BERTHA DETRY
Bertha Detry - dessin de Maurice Carême
©
Fondation Maurice Carême
Quand et comment ai-je commencé à écrire ? Par amour et à quinze
ans. Epris comme on peut l’être à cet âge, d’une petite amie avec qui
j’avais joué, enfant, je cherchais un moyen exceptionnel de lui déclarer ma
passion. Je lisais naturellement Musset avec avidité. Un jour les Stances
à Ninon me frappèrent :
Si je vous le disais pourtant que je vous aime,
Qui sait, brune aux yeux bleus, ce que vous en diriez...
Transporté d’une joie étrange , je plagiai honteusement le
premier vers, je mis le second en harmonie avec la couleur des cheveux et des
yeux de l’aimée. Puis, oubliant Musset, je composai les Stances
à Bertha. Je fus étonné de la facilité avec laquelle je rimais et, comme
ma déclaration en vers me valut un rendez-vous dans un chemin creux, un baiser
et une magnifique pochette mauve, brodée exprès pour moi, je chantai le
rendez-vous, le baiser, la pochette. Je trouvai bientôt un tel plaisir à
versifier que je me mis à composer des poèmes à propos de tout et de rien. Ma
petite amie ne devait jamais quitter Wavre où, adulte, elle fit de sa pâtisserie
Au fin bec, un des lieux renommés de la tarte au fromage blanc, le fameux
« blanc stoffe » des Macas.
Maurice Carême
Bertha Detry mourut à Wavre
quelques mois après le poète
N’est-ce pas l’ombre de Bertha
Qui fuit à travers les épeautres ?
Bien sûr, tu en as aimé d’autres,
Toutes jolies en ce temps-là.
extrait du poème « Ah ! tu peux te laisser glisser » - Brabant
L’ombre de la première aimée
N’est plus qu’une ombre entre les ombres...
extrait du poème « L’autre côté » - L’eau passe